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Maman, ce dimanche-là

Entre un verre de rosé, quelques cerises choisies, un passe-partout à décider, et ces rires qui ne s’usent jamais, il y eut ce moment suspendu que seuls les cœurs familiers savent reconnaître. Une fête des mères sans ruban, mais pleine de lumière.

C’était un dimanche d’avant l’été, un de ces jours qui savent retrouver leur place, là où l’on se sent attendu.
Le rosé s’est installé le premier, d’un rose pâle qui ne cherche pas à briller,mais qui sait, à sa manière, dire qu’il est heureux d’être là.
Elle, elle m’attendait, avec ses gestes sûrs, son sourire sans apprêt,et cette manière qu’ont les mères de faire comme si tout était simple, alors que tout est précieux.

Sur la table, des tranches de saucisson, bien sûr, et, clin d’œil savoureux, quelques pop-corn à la truffe.
Inutile de lui demander d’où ils viennent, il y a des adresses qu’on reconnaît comme on reconnaît une main aimée, des plaisirs discrets, choisis, et une fidélité silencieuse à ce qui nous lie.
Nous avons parlé. Évoqué des visages effacés, des années qui réapparaissent dans un mot, une intonation, une date évoquée. Nous avons ri, aussi, de ce rire clair, un peu facile, celui qui appartient aux retrouvailles et aux choses qui ne passent pas.
Au dessert, il y eut des cerises. Rouges comme des promesses tenues. Elle les avait choisies pour nous, je le sais bien.
Elle se faisait plaisir autant qu’à moi. Comme on choisit un parfum d’enfance ou une nappe qu’on ne sort qu’aux jours qui comptent.

Et puis, comme souvent entre nous, la conversation a quitté le salon pour glisser vers les cadres, les papiers, les aquarelles.
Elle m’a montré sa dernière œuvre en devenir, me demandant, presque solennelle, mon avis sur le passe-partout.
Ah, ce rectangle de silence autour de l’image, ni tout à fait fond, ni tout à fait forme, mais ce qui permet à la beauté de respirer.
Je l’ai regardée, elle, surtout. Sa patience, sa précision, et cette humilité joyeuse que je lui connais bien.

La fête des mères, disaient les calendriers.
Mais ici, ce n’était pas une fête. C’était mieux que cela :
un instant suspendu, sans ruban ni discours, où l’amour, simplement, avait pris sa place.
À la bonne hauteur, dans la bonne lumière, entre deux gorgées.

Bonne fête, Maman.